(Un protocole de mesure très simple en fin d'article, pour les plus pressés, et pour les curieux, quelques points en réponse à de nombreuses interrogations que l'on retrouve chez les savonniers)
Quelques rappels :
- Définition : le pH (potentiel hydrogène) est un outil (une modélisation) qui permet d'estimer la concentration de l'ion hydrogène dans une solution.
- La mesure du pH se fait nécessairement (pour ce qui nous occupe) en solution aqueuse
- Par convention, on mesure le pH sur une échelle allant de 0 à 14 en solution aqueuse à 25°C (par extrapolation, d'autres solvants que l'eau sont employés pour des valeurs au delà de ces deux limites (<0>14) )0> et 7 représente la neutralité. (notez que la mesure d'un pH = 7 à une température donnée ne sera pas la même à une autre température) ---> il est important de toujours travailler à même température. Idéalement 25°C (mais on peut travailler entre 20 et 25°C, pourvu qu'on conserve une valeur constante pour les différentes mesures et pour l'étalonnage, il y a néanmoins une marge de tolérance pour ces variations de température )
- Acide/basique : on considère acides les valeurs inférieures à 7 et basiques celles supérieures à 7.... Un acide en solution aqueuse forme des ions hydrogène H+ Le degré d'acidité est strictement lié à la présence (concentration) de ces ions H+. Corrélativement, le degré d'alcalinité (base) est lié à la présence d'ions OH- qui se forment lorsqu'une base se dissout dans l'eau.
- Valeur/ Variation : Lorsque la valeur du pH diminue de 1, la solution est 10 fois plus acide, et à l'inverse 10 fois plus basique quand elle augmente de 1.
- Matériel de mesure : en premier lieu, éviter absolument le papier bandelette qu'on trouve communément, il est inadapté aux TA, dont le savon. (certains prétendent avoir un savon au pH neutre ou faiblement basique alors qu'il s'agit d'une erreur de lecture, le savon ne pouvant avoir un pH inférieur à 9). Il faut choisir un pH-mètre adapté et de bonne qualité. Il va de soi qu'il faut se conformer aux indications jointes à votre matériel. Vous avez compris qu'on travaille à température constante (bien que certains pH-mètres corrigent la valeur en tenant compte de la température), pour les solutions tampon comme pour la solution de savon (écart de température max 5°C). Notons en outre qu'il faut employer des solutions tampons dont les valeurs encadrent la valeur à mesurer (attendue... exp si vous souhaitez mesurer un pH autour de 6; la valeur de l'une des solutions tampon doit être inférieure à 6 et l'autre solution tampon doit avoir un pH supérieur à 6)
- Précision des mesures : Outre les questions de matériel de mesure ou de température... La mesure du pH est valable pour des solutions très diluées. Plus on augmente la concentration, moins la lecture sera précise. Comme beaucoup le supposent à juste titre, une solution très concentrée n'aura pas le même pH qu'une concentration peu concentrée... En pratique, on ne mesure le pH du savon que pour des solutions de concentrations de 1 à 10% (généralement 1%). Pour affiner la précision de lecture, un étalonnage fréquent et nécessaire (en plus du bon entretien du matériel)
PROTOCOLE (mesure)
1) Travailler avec de l'eau et des solutions tampon à 25°C idéalement (entre 20 et 25°C)
2) Dissoudre 0.5g de savon dans 49.5g d'eau DEMINERALISÉE ou PURIFIÉE (pour solution à 1% ; ou jusque 10% soit 5g de savon pour 45g d'eau ; pour une mesure plus précise, il est préférable de bien dissoudre le savon, et cela plaide encore en faveur d'une solution très diluée)
3) Avec un pH-mètre étalonné avec des solutions tampon encadrant la mesure à prendre, lire le pH de la solution (il est parfois indispensable d'attendre un moment la sonde immergée dans la solution pour la lecture du pH, temps variant selon le matériel)
Remarques :
- Pour qu'un savon soit caustique (ce qu'on veut éviter bien-entendu), au terme de la réaction, il faudrait que la soude caustique ait été introduite en excès. Or dans nos formules (SAF/ surgras), NaOH est le réactif limitant, et la saponification étant une réaction totale, il ne reste plus de soude caustique dans le savon mais au contraire le surgraissage. (pour les savons type marseille, on travaille à l'inverse avec un excès de soude, on élimine la soude n'ayant pas réagi par la délipidation) Donc sauf pour la libération des lots, ou par curiosité intellectuelle, déterminer le pH de son savon n'a pas vraiment d'autre intérêt, le pH sera celui correspondant à votre recette. voir dernière remarque.
- Pour déterminer précisément la fin de réaction (saponification), il faudrait effectuer un titrage (point d'équivalence, HCl.. ou déterminer -préalablement aux mesures de vérification- théoriquement et précisément le pH attendu...) En effet la valeur du pH des savons se situe dans une fourchette en fonction des formules; ce n'est donc pas une valeur fixe qui permet d'affirmer qu'on a atteint la fin de réaction.
- De même, la cinétique de la saponification ne permet pas de déterminer de manière précise et arrêtée, le temps qui sera nécessaire à la réaction (sans tenir compte / préétablir les facteurs cinétiques : la température, l'agitation, la concentration de la lessive de soude, etc... vont influencer la vitesse de réaction)
- De là, la cure conventionnelle d'un mois minimum assure l'éventuelle marge d'erreur tout en permettant au savon de se bonifier et à l'eau de s'évaporer (savon plus durable, moins mou) / Il en va de même pour le "surgraissage" tout aussi usuel, qui allie l'avantage d'assurer la marge d'erreur tout en apportant une amélioration qualitative au produit
- la mesure du pH d'un savon n'est pas indispensable aux amateurs, et des indicateurs colorés (exp du "jus de choux rouge") feraient l'affaire en cas de doute.